Brosserie, des auxiliaires à ne pas négliger
Alors que la course effrénée aux prix gagne depuis déjà plusieurs années les enseignes de la grande distribution, les brossiers français jouent la carte des produits de qualité bénéficiant d’une charte et destinés aux professionnels. La restauration et l’industrie agroalimentaire jouent un rôle important dans la préservation d’un savoir-faire et d’une expertise acquise depuis de nombreuses années par les industriels français du secteur. Brosses, raclettes et autres accessoires sont incontournables et constituent des auxiliaires précieux dans le cadre d’une réglementation de plus en plus contraignante.
Dans quelques jours, du 9 au 20 avril 2014 prochain, la Fédération française de la brosserie (FFB) fêtera ses 150 ans à Paris en proposant au grand public une exposition unique et originale. Une occasion exceptionnelle pour la profession de faire partager un savoir-faire partagé par plusieurs centaines d’industriels il y a encore un siècle. « Aujourd’hui la fédération regroupe 36 adhérents tous secteurs d’activité confondus et 7 industriels dans le domaine de la brosserie professionnelle. Cette activité représente environ 2 000 salariés en France. Même si ce chiffre peut paraître modeste, il traduit malgré tout une dynamique qui n’est pas forcément la même dans les autres pays d’Europe. L’Angleterre par exemple ne compte qu’un brossier… », constate Danièle Quemper, déléguée générale de la FFB. Comme le confirment Franck Thomas ou Dominique Thielin, tous deux adhérents de la fédération et comptant parmi les derniers fabricants français dans le secteur de la brosserie professionnelle et alimentaire, les industriels doivent faire des choix et bien souvent le grand écart. Le choix d’aller ou non sur les marchés grand public de plus en plus cannibalisés par des importateurs, ne se pose plus vraiment pour les derniers « vrais » brossiers français. Quand une brosse ou un balai se négocie quelques centimes d’euros, - « à un prix inférieur à celui d’un café sur une aire d’autoroute », note un fabricant – auprès d’une enseigne de la grande distribution, le jeu n’en vaut pas la chandelle. Il ne s’agit même plus de vendre à prix coûtant, mais à perte… C’est ainsi que l’on peut se retrouver, dans une grande surface, avec des manches dont le filetage ne correspondra pas aux accessoires, ou réciproquement !
« Notre seul salut passe par l’innovation, le développement de nouveaux produits, la qualité de fabrication et la réactivité face à nos clients. Heureusement, nous avons la chance de travailler sur le secteur de la brosserie alimentaire sur lequel la réglementation est stricte et les clients exigeants en matière de qualité », se félicite Dominique Thielin qui préside aux destinées de Maine Brosserie, l’entreprise sarthoise qui réalise plus de 11 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploie une quarantaine de salariés.
L’expertise française s’exporte
« Le marché est devenu européen, voire mondial. Notre force réside dans la gamme professionnelle. Nous travaillons de plus en plus avec des distributeurs qui vendent non seulement à l’industrie agroalimentaire laquelle a besoin d’outils de qualité certifiés aux normes, mais aussi aux entreprises de propreté qui commencent à mesurer l’importance de la brosserie », commente Franck Thomas, à la tête de Brosserie Thomas, qui compte 49 salariés. Premier fabricant national, certifié ISO 9001 depuis plusieurs années, et réalisant quelque 15 millions d’euros de chiffre d’affaires, l’industriel revendique son statut de PME pour laquelle flexibilité et capacité d’adaptation au marché constituent deux préalables à la croissance. Dans un métier où il faut jongler avec des centaines de références et garder en permanence en ligne de mire l’innovation, le besoin client et la performance de l’outil de production sont essentiels.
N’hésitant pas à multiplier les présences sur les grands salons internationaux (Interclean Amsterdam par exemple), la Brosserie Thomas sait que le développement de son activité passe par les marchés à l’export. Mais pas n’importe quels marchés ni n’importe quels produits. L’expérience française, acquise dans la brosserie alimentaire, permet à ces entreprises de conserver une longueur d’avance et de se positionner notamment aux États-Unis. L’intérêt est double. La France bénéficie d’une bonne image sur le secteur de la cuisine et de l’alimentaire et par voie de conséquence, ses fournisseurs aussi ; d’autre part, les États-Unis n’ont pas les mêmes exigences réglementaires, ni le même niveau d’équipement, notamment en brosserie alimentaire. Les choses pourraient toutefois évoluer, si on en croit, par exemple, l’offensive récente des services sanitaires de l’État de Californie concernant les conditions d’hygiène et de propreté des restaurants et bars à sushis.
« Nous avons fait le choix il y a une vingtaine d’années, de nous positionner sur le créneau de la brosserie alimentaire en contrôlant la totalité du processus de fabrication. Les moulages de supports et les différents éléments sont injectés chez nous. Quant à nos fournisseurs, à qui nous sommes fidèles, nous travaillons en confiance et de façon régulière avec eux », insiste Dominique Thielin qui regrette le tournant low-cost pris par un certain nombre de ses concurrents, petits pour la plupart. « Ce ne sont plus seulement des industriels, mais aussi des distributeurs qui font des coups en cassant les prix. Ils ont un petit chiffre d’affaires, réalisé sur du volume et les produits ne sont jamais les mêmes… Quel numéro d’agrément ont-ils pour la brosserie hygiène ? »
Des raclettes de plus en plus résistantes
En ce qui concerne les matériels destinés à l’industrie agroalimentaire ou à la restauration, la notion de sécurité et de qualité des produits prévaut plus que jamais, avec, en toile de fond l’obsession du fameux « risque zéro ». Même s’ils ne revendiquent aucune innovation révolutionnaire en matière de brosserie alimentaire, les principaux fabricants, français notamment, peuvent mettre à leur actif des gammes complètes, parfaitement normées, répondant aux exigences les plus strictes. Des exigences qui concernent aussi bien les matières premières utilisées – respectant les normes alimentaires tout en étant capables de supporter lavage et désinfection – mais aussi la nomenclature des codes couleurs qui permettent aux utilisateurs d’affecter chaque matériel à un environnement spécifique évitant ainsi tout risque de contamination croisée.
Comme le constate Laurent Vidrequin, à la tête de l’entreprise familiale du même nom installée depuis les années cinquante dans le Nord de la France, et spécialisée dans les raclettes, la demande évolue. « Depuis quelques années, nous travaillons beaucoup plus les gammes alimentaires, car l’exigence des métiers de bouche est plus forte. Aujourd’hui les artisans, comme les bouchers ou les boulangers, sont de plus en plus attentifs aux normes et à la réglementation. Ils représentent un marché significatif par rapport aux grands clients traditionnels que sont les hôpitaux ou les sites agroalimentaires. Notre force est de produire sur place et d’être très réactifs : nous pouvons fournir jusqu’à 250 000 raclettes par mois. Les évolutions techniques sur ces produits ne sont pas spectaculaires, mais il faut toujours veiller à proposer des matériels les plus résistants possible, car les raclettes sont souvent malmenées ! Les évolutions se jouent plus aujourd’hui sur le design des produits. »
Une exigence de robustesse qui est aussi au cœur du savoir-faire de l’autre grand fournisseur de raclettes, la société belge Vanzeebroeck sous la marque Heva. « Nos raclettes sont connues pour être les plus résistantes du marché. Les grands utilisateurs de l’industrie agroalimentaire recherchent toujours la qualité avec des matériels offrant plus de matière et une mousse compacte. L’objectif est de faire en sorte qu’elles durent plus longtemps et garantissent un meilleur appui sur le sol. La filière pêche notamment (poissonneries, mareyeurs, chalutiers…)   exige des manches en fibre de verre et des raclettes polypropylène ultra solides et garanties incassables », insiste le fabricant belge.
Du bon matériel pour des professionnels bien formés
Depuis le 1er octobre 2012 les établissements de restauration commerciale peuvent être contrôlés sur le respect des conditions de fonctionnement en matière d’hygiène, mais aussi et surtout sur le suivi d’une formation, encadrée par un référentiel de capacités. Celui-ci identifie les activités que les stagiaires doivent être capables de réaliser à l’issue de la formation. La mise en place d’une formation obligatoire de 14 heures devrait donc améliorer une situation partiellement dégradée, malgré la mise en place du « paquet hygiène » en 2006 et la nécessité de respecter les protocoles imposés par le HACCP. Les professionnels de l’hygiène – fabricants de produits et de matériels, distributeurs, entreprises de propreté – sont les premiers à constater une forte disparité selon les environnements et la nature de l’activité pratiquée. Ainsi les installations de restauration commerciale, classées à hauts risques par les pouvoirs publics, sont-elles d’une façon générale, mieux armées pour faire face aux problèmes d’hygiène. La multiplication des contrôles, mais aussi autocontrôles et inspections diverses, expliquent aussi cette plus grande vigilance et ce respect des techniques de nettoyage
et de désinfection.
 Du ménage à l’art… tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les brosses !
Pour fêter ses 150 ans d’existence, la Fédération française de la brosserie a choisi de mettre ses adhérents à l’honneur au travers d’une exposition qui se tiendra à Paris du 9 au 20 avril. C’est à Muriel Rousseau, ethnologue du patrimoine industriel et des techniques qu’a été confié la délicate tâche de réunir des objets – parfois très rares – mettant en lumière tout le savoir-faire des industriels du secteur. Ainsi les visiteurs pourront-ils mesurer la technicité offerte par différentes brosses destinées au nettoyage des surfaces, mais aussi par de petites pièces cylindriques composées de poils très soyeux et destinés à l’industrie de précision, où à l’agroalimentaire avec un spécimen de brosse utilisée pour la fabrication des… petits-beurre LU ! « Du ménage à l’art », du 9 au 20 avril 2014, viaduc des arts,
 123 avenue Daumesnil, 75 012 Paris
 La brosserie au cœur du process alimentaire
Spécialistes et experts de l’hygiène en cuisine le répètent à l’envi : une brosserie de qualité rend des services incomparables en termes de qualité et d’efficacité d’intervention. Ce ne sont pas les deux principaux fabricants français, Brosserie Thomas et Maine Brosserie, qui vont contredire cette analyse. Ils se battent, avec succès le plus souvent, pour faire comprendre quelques messages simples mais essentiels. « Les matériaux doivent pouvoir être lavés et désinfectés dans toutes les conditions et répondre aussi à des conditions d’utilisation « heavy duty ».
Dans une cuisine collective le personnel travaille à flux tendu et n’a jamais le temps. Il faut aussi prendre en compte la qualité des montures et des fibres alimentaires qui composent ces matériels. On peut ainsi multiplier par 30 ou 40 leur durée de vie », nous confiait pour sa part Franck Thomas, dirigeant de Brosserie Thomas,
à l’occasion d’un sujet consacré à l’HACCP. Un souci de qualité et d’ergonomie des matériels que l’on retrouve aussi dans la gamme proposée par Maine Brosserie, qui profite de l’édition 2011 du salon Europropre pour présenter des produits permettant une meilleure prise en main et un confort d’utilisation dans le but de prévenir les TMS.
Charte de la « Brosserie d’hygiène professionnelle »
Sous l’impulsion de la France, pays moteur en matière de brosserie professionnelle, la fédération européenne a adopté une charte encadrant très rigoureusement les matériels destinés à une utilisation alimentaire (production, stockage, transport, vente…).
Les fabricants peuvent donc faire contrôler leurs produits auprès d’un laboratoire indépendant et se prévaloir de ce label, garantissant la conformité à la réglementation relative aux matériaux au contact de denrées alimentaires.